Le créateur de Barnahus, Bragi-Gudbrandsson, dans le podcast de Davidhorn

La naissance de Barnahus : Comment l’Islande a révolutionné la protection de l’enfance

Derrière la conversation

Dans un récent épisode de l’émission« Beyond a Reasonable Doubt« , l’animateur Ivar Fahsing a rencontré Bragi Guðbrandsson à Reykjavik pour discuter de l’une des innovations les plus importantes dans le domaine des services de protection de l’enfance. Leur conversation a révélé l’histoire fascinante de la façon dont un petit pays nordique a été le pionnier d’un modèle qui allait transformer la façon dont l’Europe traite les cas de maltraitance d’enfants.

Résumé

  • Un système en crise : Au milieu des années 1990, l’Islande a découvert que son système de protection de l’enfance était gravement fragmenté entre 180 comités locaux, que les enfants étaient soumis à de multiples entretiens et qu’ils étaient de nouveau traumatisés par la procédure judiciaire, d’où la nécessité d’un changement systémique.
  • Une solution révolutionnaire : Bragi Guðbrandsson a développé Barnahus (« Maison des enfants »), un concept révolutionnaire qui a réuni tous les services de protection de l’enfance sous un même toit, offrant un environnement adapté aux enfants pour les entretiens médico-légaux, les examens médicaux et les thérapies, malgré la résistance initiale des professionnels de la médecine et de la justice.
  • Impact international : Le modèle Barnahus s’est depuis étendu à 28 États européens, chaque pays l’adaptant à son cadre culturel et juridique spécifique tout en conservant son principe fondamental de protection centrée sur l’enfant, démontrant ainsi qu’un changement systémique fondamental peut conduire à de meilleurs résultats pour les enfants vulnérables.

Un système en crise

Au milieu des années 1990, l’Islande a été confrontée à une révélation surprenante. Une étude révolutionnaire a montré que les abus sexuels sur les enfants étaient bien plus répandus que ce que l’on avait imaginé. Le système censé protéger ces enfants vulnérables était fragmenté entre 180 comités locaux, dont beaucoup desservaient des populations de moins de 300 personnes. Les enfants étaient interrogés à de multiples reprises, confrontés à leurs agresseurs présumés devant les tribunaux et subissaient un nouveau traumatisme profond dans le cadre du processus même qui était censé les aider.

La vision du changement

C’est là qu’entre en scène Bragi Guðbrandsson, qui deviendra l’architecte de l’une des plus importantes réformes des services de protection de l’enfance.

« Nous avions plus de 100 cas par an traités dans différents secteurs – protection de l’enfance, police, profession médicale – mais le système était totalement incapable de traiter ces cas », explique M. Guðbrandsson. La recherche a révélé un manque inquiétant de collaboration entre les agences, l’absence de lignes directrices professionnelles et le fait que les enfants étaient soumis à des interrogatoires répétés.

Construction de la maison des enfants

La solution ? Barnahus – littéralement « Maison des enfants » – un concept révolutionnaire qui regroupe tous les services sous un même toit. Mais la création de ce havre de paix pour les enfants vulnérables n’a pas été sans difficultés. La profession médicale s’y est d’abord opposée, préférant effectuer les examens dans les hôpitaux. La communauté juridique s’inquiétait de la neutralité, arguant que les palais de justice étaient des lieux plus appropriés pour recueillir les témoignages.

Faire ses preuves

Pourtant, la vision de Guðbrandsson a perduré. En créant un environnement accueillant pour les enfants, où les entretiens médico-légaux, les examens médicaux et les thérapies peuvent avoir lieu, Barnahus a considérablement amélioré l’expérience des enfants et la qualité des preuves recueillies.

L’impact a été immédiat et mesurable. Les recherches comparant les expériences des enfants dans les palais de justice et dans les Barnahus ont montré des différences frappantes. Alors que les enfants rencontrent souvent leurs agresseurs présumés dans les ascenseurs ou les couloirs des palais de justice, les Barnahus offrent un environnement sûr et non intimidant qui permet aux enfants de mieux partager leur expérience.

Un modèle qui a traversé les frontières

Ce qui a commencé en Islande s’est maintenant répandu dans toute l’Europe, 28 États ayant adopté le modèle. Mais ce qui est peut-être le plus fascinant, c’est l’évolution de Barnahus. Comme le souligne Guðbrandsson, « Barnahus n’est pas une recette pour l’atelier de cuisine du futur. Barnahus contient plutôt les ingrédients nécessaires pour créer quelque chose qui correspond à votre culture, à votre cadre juridique et à vos traditions professionnelles ».

S’adapter aux besoins locaux

Cette flexibilité a été la clé de son succès. Chaque pays a adapté le modèle à son propre contexte juridique et culturel, tout en conservant le principe de base : placer les besoins des enfants au centre du processus.

Un héritage de changement

La diffusion de Barnahus dans toute l’Europe représenteplus que l’adoption d’un nouveau système : elle représente un changement fondamental dans la manière dont nous envisageons la protection des enfants vulnérables. Elle montre que lorsque nous donnons la priorité à l’expérience de ceux que nous essayons d’aider, nous obtenons souvent de meilleurs résultats pour toutes les personnes concernées.

Du premier centre à Reykjavik à des dizaines d’autres dans toute l’Europe, Barnahus témoigne de ce qui peut être réalisé lorsque nous sommes prêts à repenser fondamentalement nos systèmes établis. Il nous rappelle que, parfois, les solutions les plus efficaces ne proviennent pas d’améliorations progressives des processus existants, mais de l’audace d’imaginer une approche entièrement nouvelle.